En l’espace de quelques mois, DeepSeek est passée du statut de jeune pousse méconnue à celui de géant potentiel de la tech. Les analystes peinent d’ailleurs à estimer la valeur réelle de l’entreprise tant son essor est rapide et atypique.
Selon plusieurs sources du capital-risque interrogées début 2025, la valorisation de DeepSeek pourrait se situer dans une fourchette extrêmement large, de 1 milliard à plus de 150 milliards de dollars. À l’extrémité haute de cette estimation, la startup fondée il y a à peine deux ans deviendrait la troisième licorne chinoise la plus valorisée, derrière les mastodontes ByteDance (maison mère de TikTok) et Ant Group (services financiers d’Alibaba).
Même en retenant un scénario intermédiaire autour de 30 milliards de dollars, le principal actionnaire Liang Wenfeng – qui détient environ 84 % des parts de DeepSeek – entrerait dans le club des personnalités technologiques les plus riches d’Asie.
Cette fulgurante création de valeur s’est réalisée sans financement externe majeur. Contrairement à la plupart des startups de l’IA qui enchaînent les levées de fonds, DeepSeek n’a accueilli à son capital aucun grand investisseur de la Silicon Valley ou des fonds souverains : Liang Wenfeng, fort de sa réussite dans la finance quantitative, a financé le projet sur ses propres fonds et conservé un contrôle quasi-intégral de l’entreprise.
D’après les registres chinois, Liang détient directement ou via des entités affiliées près de 84 % de DeepSeek, ce qui fait de lui l’artisan solitaire de ce succès inédit.
Cette indépendance financière confère à la société une grande latitude stratégique, lui épargnant la pression à la rentabilité immédiate que subissent souvent les jeunes pousses soutenues par du capital-risque.
Reste que la valorisation de DeepSeek est, à ce stade, en grande partie théorique. La startup n’a pas révélé de chiffres de chiffre d’affaires significatifs et son modèle économique – basé sur l’open source et des coûts d’utilisation très bas – diffère radicalement des standards du secteur. Certains observateurs s’interrogent sur la soutenabilité d’un tel modèle à long terme.
Pour justifier une valorisation à douze chiffres, DeepSeek devra sans doute démontrer qu’elle peut monétiser son écosystème autrement, par exemple via des services premium pour les entreprises, des partenariats stratégiques ou des déploiements à grande échelle dans divers secteurs.
En attendant, la simple anticipation des possibilités offertes par sa technologie suffit à affoler les compteurs : début février, une estimation de Bloomberg évoquant un potentiel de 155 milliards de dollars a fait les gros titres et alimenté la spéculation sur une éventuelle entrée en Bourse prochaine.
DeepSeek, encore embryonnaire en tant qu’entité commerciale, est déjà un phénomène financier. La question est de savoir si la réalité économique finira par rattraper la ferveur du moment – ou si l’étoile montante chinoise saura transformer l’essai technologique en empire industriel durable.